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Le lithium est de plus en plus répandu dans les piles et batteries alimentant appareils électroniques et véhicules électriques.
Cette demande en hausse constante amplifie le cortège de nuisances environnementales et humaines autour des zones d'extraction. Et d'autant plus que le taux européen de recyclage du lithium est très faible.
Dans sa quête de "solutions propres", l'Union européenne a-t-elle raison de se rendre de plus en plus dépendante de ce métal pas si "vert" que ça ?


Pourquoi la demande en lithium explose ?

2013 03 lithium 04 utilisationEn ayant le double avantage d'être le plus léger métal sur terre et de convertir très efficacement l'énergie chimique en énergie électrique, le lithium est déjà présent dans les batteries au lithium (batteries Li) depuis une dizaine d'années, en plus de servir depuis longtemps à plusieurs autres filières industrielles.

Désormais, il intervient aussi dans de nombreuses technologies où une source d'électricité puissante, légère et rechargeable est utile : beaucoup de nouvelles piles et batteries utilisent du lithium sous sa forme ionique.

Ces récentes batteries Li-ion se déclinent sous des formes variées, des plus petites pour nos téléphones, appareils photos, souris, téléphones sans fil, dispositifs à piles-boutons... aux plus imposantes pour les grosses batteries industrielles ou automobiles.
Or, avec 113 g de lithium (600 g de carbonate de lithium) par kWh de capacité de stockage de batterie, on passe de quelques grammes de lithium dans une batterie de portable à près de 3 kg de lithium (près de 15 kg de carbonate de lithium) pour une batterie de véhicule visant 160 km d'autonomie.

Propulsées "meilleure technologie pour les futurs systèmes de stockage", ces batteries explosent : leur part de marché au sein des batteries rechargeables est passée de zéro à 80% entre 1991 et 2007.
Et l'Union européenne s'attend à une multiplication par 10 du tonnage de lithium utilisé dans les batteries portables d'ici 2020.

Mais cette progression fulgurante sera peut être dépassée par la réalité car plus de douze constructeurs automobiles ont prévu d'équiper de batteries légères lithium-ion leurs véhicules hybrides ou électriques dès fin 2013. Eux-mêmes craignent déjà que la demande des consommateurs n'excède l'offre d'ici 2020.
Prévoyant, le fabricant Toyota est déjà engagé depuis 2010 dans une joint-venture pour s'assurer l'accès à un gisement en Argentine.

2013 03 lithium 05 salars pays

Faute de chercher à collecter le lithium usagé (seules 5% des batteries lithium-ion mises sur le marché européen sont actuellement collectées après usage ; les 95% restant finissant en décharge ou incinérées), l'Europe se rend de plus en plus dépendante des - rares - pays fournisseurs (ci-contre).
Et, faute d'être décisionnaire des conditions de production, elle favorise aussi les impacts miniers autour des gisements de lithium.


Impacts de l'extraction de lithium

2013 03 lithium 03 bassinLe lithium utilisé dans les batteries lithium-ion* se trouve dans la saumure de marais salants essentiellement localisés sur les plateaux arides de quelques pays andins (Bolivie, Chili,...).
Des trous sont percés dans la croûte de sel afin de pomper cette eau salée, contenant entre 0,023 et 0,15% de lithium. Après 18 à 24 mois d'évaporation - favorisée par le soleil et le vent - le résidu contient 6% de lithium. Le carbonate de lithium est ensuite obtenu par procédé chimique, en ajoutant du carbonate de sodium (Na2CO3) et de la chaux.

Ces pompages provoquent une raréfaction de l'eau, à laquelle s'ajoute une pollution par les produits utilisés. Air et eau pollués contaminent ensuite à leur tour les écosystèmes et la (rare) nourriture des populations de ces zones arides.

Ces impacts sont dénoncés par plusieurs communautés vivant sur des sites comme Atacama au Chili ou Hombre Muerto en Argentine : l'eau nécessaire aux hommes, au bétail et à l'irrigation y est désormais polluée et si rare que des conflits éclatent entre les groupes d'habitants.

Le problème de l'extraction serait identique en Bolivie, mais le gouvernement hésite à décadenasser sa production. Soucieux de garder le trésor (estimé à 100 millions de tonnes de lithium) sur lequel est assis le pays, il est aussi très inquiet des dégâts environnementaux et sociaux causés depuis son ouverture en 2007 par la mine toute proche de San Cristobal.

Une expérience malheureuse qui n'empêche pas la compagnie minière American Nova de s'intéresser aux marais salants de Mongolie...

Réserves et ressources

  • Réserves mondiales : 13 millions de tonnes2013 03 lithium 01
  • Ressources mondiales (y compris les réserves) : 33 millions de tonnes
    2013 03 lithium 02

Collecte et recyclage du Lithium

L'Union européenne a déjà fort à faire avec les quelques 24 kg de déchet électrique et électronique "produits" par citoyen chaque année, masse qui qui inclut le lithium des batteries plus anciennes - pour lesquelles un objectif de collecte à 45% a été fixé pour 2016.

On estime qu'en 2010, 1 289 tonnes de batteries Li-ion (soit environ 5% des batteries Li-ion mises sur le marché) et 297 tonnes de batteries au lithium ont été collectées en Europe ; l'Allemagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas ayant les meilleurs ratio de collecte, toutes batteries au lithium confondues.

Mais, si le lithium se recycle très bien, encore faut-il l'extraire des déchets après collecte...

Un effort a été fait récemment pour extraire le mercure, le cadmium, le plomb et quelques autres métaux identifiés néfastes à l'environnement des batteries alcalines et salines.

2013 03 lithium 06 prixDans les batteries Li, le carbonate de lithium s'extrait sous forme de poudre avec une valeur commerciale établie.

Mais, en ce qui concerne les batteries Li-ion, la collecte et le traitement - complexe - visant à en récupérer le lithium n'ont encore fait l'objet d'aucune directive européenne.

Quelques sociétés de recyclage, comme le belge Umicore ou le français SNAM, collectent et traitent des batteries Li-ion pour en extraire le cobalt, l'aluminium, le cuivre et le fer. Mais quid du lithium ? Bien que son prix ait triplé entre 2004 et 2007, il reste trop peu cher pour que sa récupération soit rentable. La mise en décharge et l'incinération restent donc ses deux destins les plus probables.

Et si le spécialiste français de traitement des batteries SARP Industries/Euro Dieuze a mis au point un procédé de récupération hydro-métallurgique, bien peu de détails sont pour l'instant disponibles sur ses résultats. Pourtant, la collecte, la récupération du lithium dans les batteries et son recyclage sont un sujet crucial.

L'Europe doit réfléchir à son utilisation du lithium et à ses besoins futurs

Comme pour toute matière première jugée critique - parce qu'elle rend l'Europe dépendante de pays fournisseurs tiers et/ou parce qu'il s'agit d'éléments nuisibles à l'environnement - l'Union européenne se doit d'avoir une réflexion globale.

De combien de lithium aurons-nous besoin si les projets de recherche-développement européens continuent d'intégrer du lithium à leurs dispositifs, fût-ce en quantité réduite ?

A quelle point ces technologies prévoient-elles que le lithium puisse être récupéré en fin de vie ?

Où et à quel prix importerons-nous notre lithium à l'avenir ?

A quel prix environnemental et social pour les pays fournisseurs ?

Et - in fine - faut-il vraiment encourager et financer des projets incluant du lithium sans donner aux Européens les clés pour comprendre ce qu'ils consomment exactement dans leurs technologies "vertes" ?

 * le lithium est aussi extrait sous forme de minerai pour une utilisation dans les verres et les céramiques notamment ; il s'agit alors d'une filière très différente tant dans ses sources que dans ses procédés de purification et de transformation avant utilisation.

Sources (lien vers fichiers PDF en anglais)

pdf button Factsheet Lithium 2012 (Polinares) -

pdf button Factsheet Lithium (friends of the Earth Europe)

 

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